Première guerre mondiale
En 1914 l’Armée française, qui doute de l’efficacité d’un chien sur un champ de bataille, ne compte que 250 chiens militaires, obligeant le commandement à faire appel à des chiens de civils. On ordonne alors la réquisition des chiens des citoyens pour « participer au sauvetage de la France ». Un chenil improvisé au jardin d’acclimatation de Paris reçoit les chiens donnés par la SPA et la fourrière de Paris avant leur affectation au front.
L’usage des chiens militaires devient officiel en décembre 1915 avec la création d'un service des chiens de guerre au sein de la direction de l’infanterie. L’Allemagne, en avance sur l'utilisation du chien militaire, dispose de 6000 chiens dressés au début des hostilités. Sur 1678 chiens envoyés au front jusqu'à fin mai 1915, 1274 étaient des bergers allemands.
Leurs utilisations sont déjà multiples, chiens de ronde et sentinelles, chiens sanitaires accompagnant les brancardiers sur les champs de bataille à la recherche de blessés, chiens télégraphistes munis d’une bobine de fil se déroulant sur un trajet périlleux à travers les tranchées pour rétablir des lignes de communications coupées, chiens messagers porteurs de cartes, de munitions, de pigeons voyageurs ou parfois simplement de cigarettes.
À partir de 1915, suite aux premières attaques aux gaz à grande échelle, tous les chiens apprennent à courir avec un masque à gaz.
On estime qu’au total 100000 chiens furent mobilisés lors du conflit, 30000 côté allemand dont 7000 auraient succombé, 20000 chiens mobilisés côté français dont 5000 ne reviendront pas. Des chiffres qui ne sont que des estimations, les recensements n'ayant pas toujours été établis ou sont incertains.
Le 21 novembre 1918, une circulaire ministérielle démobilise les chiens de guerre. Les anciens combattants racontent une multitude de récits rapportant leurs exploits. Parmi eux un soldat du Mans: « Atteint d’un éclat d’obus au bras, d’une balle dans la mâchoire, d’un coup de sabre qui m’avait décollé le cuir chevelu, j’étais à-demi enfoui sous les cadavres de plusieurs camarades, quand je sentis une caresse sur mon front : c’était un bon chien sanitaire qui me léchait la figure. Je parvins à me soulever un peu malgré mes vives souffrances. Je savais que les chiens sont dressés à rapporter au campement les képis des blessés, mais le mien était perdu. Le brave chien hésitait : « Va, lui dis je, va mon toutou, va chercher les camarades ». Il me comprit, fila ventre à terre, et de retour au campement se démena si bien, aboyant, tirant celui-ci, celui-là par leur capote, qu’il attira l’attention de deux braves brancardiers : ceux-ci le suivirent, il les mena jusqu’à moi : j’étais sauvé. ».
Quelques-uns d'entre eux auront droit à une décoration, certains seront rendus célèbres suite à leurs histoires et anecdotes touchantes. De nouveaux amateurs les rejoignent et s'aperçoivent des milles qualités de ces chiens. Les premiers bergers allemands chiens guides font leurs apparitions pour assister les infirmes et mutilés de guerre.
Au lendemain de la première guerre mondiale et pour effacer toute référence à l'Allemagne, on l'appellera désormais "Chien de berger" aux États-Unis, "Chien-loup Alsacien" au Royaume-Uni et "Berger d'Alsace" en France.
Départ de chiens sanitaires à Asnières, 1915.
Chiens sanitaires, armée allemande.
Chien télégraphiste déroulant une ligne de communication.
Les chiens messagers devaient souvent franchir des obstacles dangereux.
Wolf saute ici au dessus d'une clôture faite de barbelés, sur le front occidental en Flandre (Belgique).
Chien messager de l'armée allemande, 1916.
À Maisons-Laffitte, à la société nationale du chien sanitaire et de guerre,
Rolf porte son masque contre les gaz, en décembre 1916.
Collier de chien sanitaire et collier de chien messager, Allemagne 14-18.
Premiers bergers allemands chiens guides en Angleterre, 1931.
En 2018 l'association Australian war animal mémorials inaugure à Pozières dans la Somme
un monument à la mémoire de tous les animaux morts durant la guerre de 14-18.
Seconde guerre mondiale
Pendant la Seconde Guerre mondiale, le Berger allemand va être de nouveau utilisé à tous les niveaux et par toutes les armées du monde. Les chiens sentinelles, de patrouille, de liaison, sanitaires ou encore démineurs vont continuer à être massivement employés.
Lors de sa venue au pouvoir, Hitler créa une école centrale d’entraînement du chien militaire à Kummersdorf. Ce centre cynotechnique, alors le plus grand d’Europe, accueille près de 2000 chiens. En 1939 à l’annonce de la mobilisation, l’armée française entreprend à nouveau le dressage des chiens militaires, l'École Nationale Vétérinaire d’Alfort sera chargée du recrutement. L'Allemagne qui prépare la guerre depuis plusieurs années dispose alors déjà de 50000 chiens.
Comme lors de la première guerre, de nombreux chiens mèneront des actions d'éclat. En juillet 1943 lorsqu'une escouade se retrouva sous le feu d'un nid de mitrailleuses italiennes, Chips un berger allemand croisé Husky affecté à l'armée américaine, s'élance seul contre la casemate ennemie. « Le bruit était terrible puis les tirs se sont tus. » se remémore son maître John Rowell, « J'ai alors vu un soldat italien sortir pris à la gorge par Chips. Je l'ai rappelé avant qu'il ne le tue. Et trois autres soldats italiens ont émergé les mains en l'air. » Chips avait à lui seul forcé leur reddition.
Chips subi quelques brûlures au cours de la bataille, mais il survivra à la guerre. En 1942 sa famille l'avait cédé à l'armée américaine au nom de l'effort de guerre. Il retourna auprès d'elle mais décèdera en 1946 à l'âge de six ans d'une insuffisance rénale. En 1990, les studios Disney sortiront un téléfilm basé sur sa vie, "Chips, the War Dog". Il recevra la médaille PDSA Dickin à titre posthume en 2018 et, en 2019, la médaille de la bravoure Animals in War & Peace, l'équivalent américain de la médaille Dickin.
Le 6 juin 1944, de nombreux chiens vont accompagner les hommes au combat lors du débarquement de Normandie, parmi eux Glen un "Para Dog" et son maître Emile Corteil. Ils périront ensemble le jour J:
• Le 6 juin 44, Emile Corteil et Glen sautaient sur la Normandie
Les chiens sanitaires deviennent pour la première fois chiens de catastrophe, à la recherche de victimes vivantes ou non, dans les ruines de Londres. Irma recevra la prestigieuse médaille Dickin, l'équivalent de la croix Victoria pour un militaire, après avoir refusé d'arrêter ses recherches dans les décombres alors que l'équipe de secours voulait quitter les lieux. Sa ténacité permit de sortir deux fillettes encore en vie. Irma retrouvera au total 233 victimes du blitz, dont 21 encore vivantes. Irma avait la particularité de pouvoir indiquer si la personne était vivante ou non selon sa façon d'aboyer.
L'armée américaine entraînait et utilisait déjà des chiens, principalement comme sentinelles, et au cours de la guerre, elle en mobilisera plus de 10 000, en envoyant 1900 à l'étranger.
1074 chiens, appelés les "Devil Dogs", seront enrôlés par le Corps des Marines durant la Seconde Guerre mondiale. Les chiens étaient pour la plupart donnés par des familles voulant participer à l'effort de guerre.
Utilisés au combat dans les jungles épaisses des îles du Pacifique, leurs sens aiguisés les rendaient idéaux pour prévenir des embuscades. D'autres étaient enrôlés pour transmettre les messages à travers les broussailles, bien plus rapide et discret qu'un Marine américain facilement ciblé par l'ennemi. Parmi eux, Caesar von Steuben, un berger allemand âgé de trois ans, offert en signe de patriotisme et de solidarité civile par ses propriétaires qui vivaient à New York. Caesar était déjà légendaire dans son quartier du Bronx pour livrer des courses et transporter des colis.
L'entraînement des chiens messagers consistait d'abord à les désensibiliser du chaos de la bataille, et les faire devenir indifférent aux détonations de bombes et tirs d'armes à feu. Puis les entrainer à porter leurs messages sur des distances croissantes et sur un terrain de plus en plus accidenté, jusqu'à ce qu'un chien puisse facilement passer d'un maître à l'autre sur un kilomètre d'obstacles et de dangers. Au cours de la guerre, les chiens messagers se mueront en chiens éclaireurs.
Caesar prouvera à plusieurs reprises la valeur précieuse du rôle d'un chien dans la guerre au cours de son service. Il débarqua avec son maître à Bougainville le 1er novembre 1943. Le lendemain il effectuait onze courses, totalisant 50 kilomètres sous le feu entre la patrouille et le poste de commandement.
Deux jours plus tard à l'aube, les Japonais avaient monté une attaque contre les Marines. Caesar entendit les assaillants avant son maître et se précipita hors de leur abri. Lorsque Mayo réalisa ce qui se passait, il cria à Caesar de revenir. Mais au moment où le chien se retourna, il fut atteint de deux balles par un soldat japonais. Un échange de coups de feu s'ensuivra, Caesar blessé rejoindra le poste de commandement, alors averti à quel point l'ennemi était proche.
Son état s'était détérioré. Sur le lit d'hôpital de campagne rapidement dressé, le vétérinaire retira une balle de la hanche, la seconde était logée près du cœur, « Trop risqué à enlever », déclara-t-il en pansant les blessures de Caesar. Il s'en est fallu de peu, mais trois semaines plus tard, le Marine à quatre pattes préféré des Raiders était revenu au service actif. Il sera le premier chien blessé de cette guerre du Pacifique.
Les correspondants de guerre ont eu vent des faits extraordinaires de ces chiens qui ont fait les gros titres des journaux, "Caesar aide à prendre Bougainville", titrait le New Orleans Times-Picayune, soulignant qu'aucune patrouille avec un chien n'avait perdu un homme.
Caesar a ensuite combattu à Guam puis dans le nord d'Okinawa, où le 17 avril 1945, ce grand berger allemand toujours porteur de sa balle près du cœur, sera tué au combat.
Après la capitulation du Japon, les chiens survivants retourneront à la Base des Marines de Camp Lejeune en Caroline du Nord. La moitié des 1074 chiens du Corps des Marines enrôlés ont pris part aux combats. 58 sont morts, 29 au combat dont 25 rien qu'à Guam où un mémorial leur rend hommage aujourd'hui sur la base navale américaine, et 5 sont portés disparus. Des centaines de chiens ont souffert d'infections, de parasites, de malnutrition et de déshydratation et le vacarme des détonations a pesé lourd sur le mental de beaucoup d'entre eux. 128 chiens furent euthanasiés. Cependant, un programme de démilitarisation rencontra un grand succès à la fin de la guerre, permettant de renvoyer 491 Devil Dogs chez eux. On autorisa les maîtres-chiens qui avaient forgé un lien fort avec leurs chiens à les adopter.
L’Allemagne fut le pays qui utilisa le plus de chiens lors du conflit avec près de 200000 chiens déployés. La France quelques centaines seulement persuadée que la mécanisation et la modernisation des armées rendaient le chien inutile. À la fin de la seconde guerre mondiale, le bilan est lourd, des dizaines de milliers de chiens ont donné leur vie. Le manque de chiffres précis est lié à la destruction des registres militaires, détruits soit par les troupes soit par les archivistes qui n’en voient pas l’utilité.
Soldats allemands et leurs chiens messagers.
Les Devils Dogs et leurs maîtres attendent les ordres sur Bougainville. Caesar est à droite avec son maître, le soldat de première classe Rufus G. Mayo, 1943.
Colliers de chien messager, USA 39-45.
Chips rencontre le général Eisenhower, 1945.
Deux Marines américains agenouillés aux côtés de leur berger allemand, bataille d'Iwo Jima 1945.
Irma recevant la médaille Dickin, 12 janvier 1945.
Guerre d'Indochine
Dès 1948, les chiens de guerre sont utilisés par le Corps Expéditionnaire d'Indochine. Ils sont employés, soit comme chiens de garde et de ronde en points sensibles, soit comme chiens de patrouille. Les premiers rendent journellement un travail obscur mais efficace dans les dépôts de munitions, de matériels, d'essence, dans les aérodromes. Les seconds ont économisé de nombreuses vies humaines souvent par le sacrifice de leur propre existence.
La guerre d’Indochine va être prétexte à une grande première dans l'histoire des chiens militaires avec la création de la première unité cynophile parachutiste. Six bergers allemands âgés de 2 à 3 ans, Borris, Cilly, Kado, Liedo, Lux et Remo seront les premiers combattants canins parachutistes de l'armée française. Ces chiens tombés du ciel pouvaient alors remplir leurs missions telles que la détection des mines, la surveillance, la fouille et le pistage. Une efficacité sans faille réutilisée quelques années plus tard par l'armée américaine dans les mêmes conditions.
Le chien était parachuté seul et atterrissait parfois loin de son maître.
De nos jours les chiens sont parachutés harnachés à leur maître.
Guerre de Corée
Après la Seconde Guerre mondiale, l'armée américaine ferme ses centres de dressage canin, seul le 26ème ISDP (Infantry Scout Dog Platoon) reste actif avec pour mission de montrer au public américain les capacités du chien militaire lors de manifestations à travers le pays. Quand le régiment atterri en Corée en juillet 1950 ils sont seulement sept maîtres et chiens, à la fin de la guerre 1500 auront participé au conflit. Ces chiens éclaireurs de l'armée américaine sauveront des centaines de GI durant les trois années de guerre.
Leurs missions étaient simples mais dangereuses : faire en sorte que ces chiens éclaireurs alertent silencieusement de la présence ennemie pendant les patrouilles. Un rapport rédigé après guerre établit que ces patrouilles ont permis de réduire le nombre de victimes de 65 %.
York (Matricule 011X), un berger allemand de 8 ans, fut récompensé pour ses services exceptionnels. Il dirigea 148 patrouilles de combat sans avoir perdu un seul homme. Il retourna après guerre à la base de l'US Army Fort Benning et fut enterré avec les honneurs à l'âge de 12 ans.
À la fin de la guerre, les chiens éclaireurs non affectés aux divisions d'infanterie devinrent chiens sentinelles dans la zone démilitarisée établie entre la Corée du Nord et la Corée du Sud.
Chien éclaireur en patrouille.
James Partain et son chien York recevant sa citation.
Mémorial du Chien de guerre (Colorado Springs).
Guerre froide
La guerre froide entre le bloc de l'Ouest et le bloc de l'Est s'est installé progressivement à la fin de la Seconde Guerre mondiale, en 1961 le mur de Berlin est érigé, des milliers de bergers allemands issus de la RDA sont alors déployés pour garder cette frontière infranchissable.
• Les chiens oubliés du mur de Berlin, que sont-ils devenus?
Guerre d'Algérie
Durant la guerre d'Algérie plus de 7000 chiens seront utilisés par l'armée française, principalement achetés en Allemagne. Ils seront répartis dans 99 pelotons cynophiles.
Parmi eux des chiens de garde surveillants les installations militaires, chiens démineurs qui ont permis une diminution drastique des sabotages des voies ferrées, chiens éclaireurs précédant les unités de combat, évoluant dans les terrains accidentés et les broussailles et permettant d'éviter des embuscades, et chiens pisteurs dressés pour retrouver les combattants du Front de Libération Nationale (FLN) qui avaient pour habitude de se cacher dans les grottes.
Le plus célèbre d’entre eux est Gamin, un Berger allemand du chenil militaire de Beni-Messous que personne ne pouvait approcher, sauf le gendarme Gilbert Godefroid. En mars 1958 lors d’une opération de maintien de l’ordre dans la région de Barral, le maître-chien Godefroid et son compagnon Gamin partent seul à l’avant. Après cinq heures de pistage en terrain extrêmement difficile la piste des insurgés est retrouvée, mais au moment ou Godefroid lâche son chien une rafale de mitraillette blesse mortellement le gendarme. Gamin, bien que grièvement atteint d'une balle dans la tête et d'une balle dans le poitrail, s'élance et tue son agresseur. Il rampe ensuite vers son maître et se couche sur lui pour le protéger. Il faudra 6 hommes et une toile de tente pour le maîtriser. Ramené au camp de base, il est sauvé mais personne ne pourra de nouveau l'approcher ni lui donner d'ordres.
Le 27 décembre 1958 au chenil de Beni-Messous, un carré d'honneur est formé aux ordres du lieutenant-colonel Arcouet, Gamin est alors le premier chien a être décoré de la médaille de la Gendarmerie Nationale. La hiérarchie militaire décide de le confier au chenil de Gramat (46) pour y passer une retraite paisible où, précise la note du ministère, il devra "faire l'objet de soins attentifs jusqu'à sa mort".
Gamin s'éteint le 16 mars 1962. Ses cendres seront déposées au cœur d'une stèle élevée au CNICG, réunissant dans le même souvenir, un homme et un chien devenu un modèle de fidélité et de courage.
En juillet 2005, à l’occasion du 60e anniversaire du CNICG, l’urne contenant les cendres de Gamin a été symboliquement transférée au jardin du souvenir créé dans l’école. C'est devant cette stèle du jardin du souvenir, surmontée d’une tête de chien réalisée avec des fers à cheval, qu'a lieu lors de chaque stage la cérémonie traditionnelle de la constitution des équipes cynophiles.
Fouilles dans la région d'Aurès.
Gilbert Godefroid et son chien Gamin.
Jardin du souvenir, Centre National d'Instruction Cynophile de la Gendarmerie.
Guerre du Vietnam
De nombreux Bergers allemands seront à nouveau mobilisés au cours de la guerre du Vietnam. Plus de 4000 chiens de guerre seront ainsi déployés par l'armée américaine de 1965 à 1973. Grâce à leur ouïe et leur odorat spectaculaire, ces chiens sont à l'origine de plus de 10 000 vies américaines sauvées par leurs missions de gardes, d'éclaireurs et de détecteurs d'engins explosifs. Une efficacité redoutable au point d'être devenus des cibles privilégiées pour l'ennemi, qui attaquait les chenils et offrait des primes pour l'oreille tatouée d'un chien ou le patch d'épaule de son maître.
Encore une fois les chiens de guerre font montre de leurs prouesses. Tel Nemo, un berger allemand associé à son maître l'aviateur Bob Thornburg. En 1966 lors d'une patrouille aux alentours d'un cimetière vietnamien près de leur base aérienne, Nemo se met soudain à l'affut. Mais il est trop tard pour réagir, le duo essuie des tirs ennemis venant des tombes. Une balle transperce l'épaule de Thornburg, la seconde atteint Nemo à la tête, passant sous l'œil droit et ressortant par la bouche. Malgré sa grave blessure, le chien de 40 kilos attaque les assaillants avec férocité, donnant ainsi à son maître le temps d'appeler du renfort.
Nemo retourna ensuite vers son partenaire tombé inconscient et, saignant à mort, se coucha sur lui pour faire rempart de son corps jusqu'à l'arrivée des secours.
Les deux blessés ont pu être secourus, le vétérinaire réussi à sauver la vie de Nemo, mais son œil droit était perdu.
Le 22 juillet 1967, Nemo est transféré aux États-Unis et rendu à la vie civile, devenant le premier chien américain de la campagne du Vietnam à bénéficier de cet honneur.
Le capitaine R.M Sullivan responsable du programme de chiens de détection recueilli Nemo. Ensemble, ils participèrent à de nombreuses manifestations de soutien aux troupes, jusqu'à la mort de Nemo en décembre 1972.
Lors du retrait des troupes, de nombreux maîtres ayant tissés un lien fort avec leur chien ont souhaité les ramener avec eux mais seul un petit nombre a pu retourner sur le territoire américain. Le ministère de la Défense ayant classé ces milliers de chiens comme des surplus d'équipement devant être abandonnés sur place, ils ont été sacrifiés, euthanasiés par l'armée américaine ou remis à l'armée Sud-vietnamienne, n'échappant pas à leur sort funeste. Environ 2700 chiens de guerre seront remis à l'armée sud-vietnamienne, un peu plus de 300 ont été tués au combat, 1300 ont été euthanasiés ou abandonnés, et 200 ont quitté le Vietnam. On estime qu'ils ont sauvé 10000 vies durant la guerre.
L'association Vietnam Dog Handler a été créée pour aider ces anciens combattants à faire face à la culpabilité d'avoir laissé leurs chiens derrière eux. Certains d'entre eux développeront un syndrome de stress post-traumatique directement lié à ces abandons. « C'était comme laisser votre enfant là-bas » se souvient Fred Dorr, président de l'association. Cette fin indigne a motivé les maîtres-chiens ayant servi au Vietnam à agir. En grande partie grâce à leurs efforts collectifs, la « loi Robby » a été adoptée par le Congrès américain et le président Clinton en 2000, exigeant la fin de l'euthanasie des chiens à la fin de leur carrière militaire. Cette loi autorisa également l’établissement de monuments aux morts en l’honneur des chiens tombés au combat. Mais il restait extrêmement difficile pour les maîtres de faire revenir leur chien sur le territoire américain. Ce n'est qu'en 2015 que le Congrès et le président Obama signent le projet de loi autorisant les chiens militaires à prendre leur retraite aux États-Unis. Ils sont alors d'abord proposés à leurs anciens maîtres, puis aux personnels des forces de l'ordre et enfin aux familles rigoureusement sélectionnées.
Le 28 septembre 2019, au musée militaire Motts dans l'Ohio, a été inauguré un mémorial dédié à ces chiens et à leurs maîtres. Sur ces trois panneaux de granit noir sont inscrits les noms de 4244 chiens ayant servi pendant la guerre et 297 noms des maîtres-chiens et vétérinaires décédés au Vietnam. Le panneau du milieu affiche les mots "Le lien incassable".
Un soldat et son chien éclaireur, Sud Vietnam 1966.
Chiens sentinelles et leurs maîtres-chiens, Da Nang 1969.
Nemo, matricule canin A534.
Mémorial du musée militaire Motts.
Guerre d'Afghanistan
En Afghanistan les chiens étaient principalement employés pour la détection d’explosifs et toute substances chimiques utilisées pour concocter les engins explosifs improvisés.
En avril 2016 Lucca fait la une des médias internationaux en recevant à Londres la médaille Dickin. Elle fut la première chienne du Corps des Marines des États-Unis à recevoir cet honneur. Au cours de ses six années de service, Lucca a accompli avec succès 400 missions en Irak et en Afghanistan et a protégé la vie de milliers de soldats. Aucun d'entre eux n'a jamais perdu la vie en sa compagnie.
Lors de sa dernière patrouille le 23 mars 2012, un engin piégé explose sous Lucca, entraînant la perte de sa patte. Le Caporal Rodriguez se souvient « L'explosion a été énorme et j'ai immédiatement craint le pire pour Lucca, mais je l'ai vue lutter pour se lever. Je l'ai ramassée et j'ai couru la mettre à l'abri avant de faire un garrot à sa patte blessée. Je suis resté constamment avec elle tout au long de son opération et de son rétablissement. Elle m'avait sauvé la vie à tant d'occasions, je devais m'assurer d'être là pour elle quand elle avait besoin de moi. »
Lucca fut héliportée en Allemagne pour ses soins, dix jours après l'explosion, elle marchait à nouveau. Elle entame alors officiellement sa retraite auprès de celui qui fut son premier maître durant quatre ans, le sergent Chris Willingham. Il déclarait « Lucca est très intelligente et loyale, sa motivation pour le travail en tant que chien de recherche était incroyable. Elle est la seule raison pour laquelle je suis rentré chez moi dans ma famille et j'ai la chance d'avoir servi avec elle. Aujourd'hui, je fais de mon mieux pour qu'elle soit gâtée dans une retraite bien méritée. ».
En 2015, l'histoire de sa vie fait l'objet d'un livre, "Top Dog: The Story of Marine Hero Lucca". Elle s'éteint le 20 janvier 2018 à l'âge de 14 ans. Elle recevra la médaille de la bravoure Animals in War & Peace à titre posthume en novembre 2019. En juillet 2021, ses cendres sont transférées au Mémorial du chien de guerre de Michigan ou une cérémonie est organisée en son honneur.
Lucca et le sergent Chris Willingham, Irak 2006.
Lucca et le caporal Juan M Rodriguez, 2012.
Lucca pose avec sa médaille Dickin.
De nos jours les chiens sont encore utilisés lors des conflits armés. En plus d’accomplir leurs missions, ils apportent également une part de réconfort moral aux soldats, déployés en zone de guerre depuis plusieurs mois ou plusieurs années loin de leurs familles. À travers de nombreux récits, témoignages poignants et photos inédites, plongez dans l'univers de ces soldats à quatre pattes dans les moments les plus sombres de la guerre. En vente sur amazon.fr